Les irréductibles Haut-Souletins
En s’imposant le 14 mai en région toulousaine, les handballeurs de Tardets ont réalisé un exploit colossal : faire accéder ce village de 600 âmes en N1, plus haut niveau amateur.
Nous sommes en l’an 22 du XXIe siècle. Toute la Gaule du sport en général et du handball en particulier, est occupée par les rois de la finance et de la planche à billets. Toute ? Non ! Un village peuplé d’irréductibles Haut-Souletins résiste encore et toujours, et la vie n’est pas facile pour les garnisons venant de Burdigala ou Tolosa lorsqu’ils franchissent les montagnes basques pour venir y défier les handballeurs du Zibéro Tardets. Non loin de leur montagne sacrée, « la Madeleine », les Arhix, Etcheberix et autre Khayarix mènent la vie dure aux puissantes armées financières venant bien souvent en conquérants avant de regagner, défaites, leurs pénates. Dans ce village de moins de 600 âmes, on cultive plus qu’ailleurs le don de soi, la solidarité et la vaillance. Ici, point de druide et la potion magique ne se consomme pas avant les batailles, mais après, au cours des troisièmes mi-temps, à grandes gorgées d’Irouléguy ou de Patxaran. Dans le sport collectif le plus titré en France (8 fois champions du Monde, 4 d’Europe et 4 titres olympiques, garçons et filles confondus), le Zibéro Tardets fait figure d’anomalie. Mais une anomalie que l’on aime bien dans ces contrées reculées où le mot valeur sert avant tout à qualifier les qualités humaines. En 2023, le « Xibero » comme on l’appelle ici, fêtera ses 70 ans, ou plutôt ses 70 printemps. Car il ne cesse d’offrir un vent de fraîcheur dans ce monde impitoyable que devient de plus en plus le sport. En 2013, après plusieurs saisons passées dans l’anonymat de la prénationale, Tardets retrouve le niveau national du handball, en accédant à la N3. Nombre de spécialistes promettaient alors le pire à ces « petits villageois » qui avaient l’outrecuidance de venir pointer le bout de leur nez à la table des nantis.
Une épopée démarrée dix ans plus tôt
Une décennie après, non seulement ils sont toujours à la table nationale, mais leur appétit est allé grandissant. Trois ans après l’accession en N3, ils remettent le couvert et accèdent à la N2. Un niveau que le club avait déjà connu….au siècle dernier ! On parlait déjà de miracle. Affamés, les Etchandix et compagnie visaient un nouveau challenge : battre le record de leurs ancêtres, restés 5 ans en N2 dans les années 90. L’objectif fût atteint également. Cette fois cela ressemblait à la fin de la belle aventure. Que nenni ! Le début de la présente saison les voyait enchaîner les victoires comme Obélix assommait sangliers et romains, et à la fin de l’automne, le Zibéro se détachait à la première place de la N2….du jamais vu au club. Partis dans cette folle épopée dix ans plus tôt, une dizaine de joueurs nés en 1994, jouant ensemble depuis l’école de handball, arrivait à « maturité »…avec un rêve fou : pourquoi ne pas tenter de franchir l’ultime étape ? Celle menant au plus haut niveau amateur. Le genre de rêve réalisable dans les années 80 ou 90, mais aujourd’hui en 2022, avec une telle évolution dans le sport, avec l’argent du Golfe, des USA, de quelques milliardaires plus ou moins exotiques, comment une telle équipe de copains, totalement bénévoles, pouvait-elle oser avoir ce type d’ambition ? Car au Zibéro, pas un joueur ne touche le moindre sesterce, pas plus que le staff technique. Les primes de matchs ? Une cervoise après la victoire, rien de plus. Souvent ces équipes sont invincibles à domicile et friables à l’extérieur. Mais le Zibéro a construit son ascension à l’extérieur. En 2013 lors de la montée en N3, c’est à Eysines que les Tardetsiens ont compostés leur billet, et en 2016 c’est à Asson qu’ils ont remporté le match de la montée en N2. Le 14 mai dernier c’est à L’Union dans la banlieue toulousaine qu’ils ont décrochés, une journée avant le terme, l’accession en N1. Un niveau jamais atteint par le Zibéro, un niveau où aucune autre équipe de village n’existe. En face, on souhaite bon courage aux formations venant de Chartres, Nantes et Rennes…. lorsque sur le chemin ils croiseront Plagnardix et ses amis.
Fabrice Borowczyk
« Coup de sifflet final à L’Union : joueurs et supporters peuvent communier avant de fêter l’accession autour d’un banquet de quelques cervoises ».
« Ils l’ont fait ! Les irréductibles haut-souletins ont atteint la N1, plus haut niveau amateur du handball »